La notion d'idéologie dans le domaine de l'éducation et de la recherche sur la communication interculturelle
La notion d'idéologie dans le domaine de l'éducation et de la recherche sur la communication interculturelle met en lumière le rôle omniprésent et inévitable des idéologies dans la manière dont nous comprenons, pratiquons et enseignons l'interculturalité. L'auteur commence par déconstruire certains mythes sur les idéologies, notamment l'idée fausse selon laquelle certaines approches seraient purement scientifiques, non idéologiques, ou que les idéologies seraient immuables. Au contraire, l'auteur affirme que les idéologies sont dynamiques et souvent dissimulées derrière des prétentions d'objectivité ou de neutralité.
L'idéologie est définie ici comme un ensemble de croyances, de valeurs et de systèmes de pensée qui influencent de manière invisible nos comportements et nos discours. Ces systèmes sont souvent acceptés sans être remis en question, car ils sont profondément enracinés dans nos habitudes culturelles et sociales. L'auteur rappelle que tout ce que nous faisons, que ce soit dans nos critiques ou nos affirmations, est teinté d'idéologie, même lorsque nous prétendons en être exemptés.
La discussion s'appuie sur des théoriciens clés tels que Karl Marx, Louis Althusser et Adrian Holliday pour expliquer le rôle des idéologies dans la reproduction des structures de pouvoir. Marx et Althusser, par exemple, voient l'idéologie comme un outil de domination utilisé par les classes dirigeantes pour maintenir le statu quo. Les institutions comme l'école, l'État ou les médias deviennent des "appareils idéologiques" qui façonnent nos identités et nos rôles sociaux. Holliday, quant à lui, critique certaines idéologies dominantes dans le domaine de l'interculturalité, comme celle de la non-essentialisation, qui, bien que visant à dépasser les stéréotypes, peut parfois devenir elle-même une forme de dogme idéologique.
L'une des réflexions centrales de l'article est la difficulté de séparer connaissance et idéologie. Les concepts, théories et notions que nous utilisons en communication interculturelle sont souvent considérés comme des savoirs objectifs, alors qu'en réalité, ils sont imprégnés d'idéologies dominantes qui façonnent notre manière de penser. Par exemple, des termes comme "dialogue interculturel" ou "sensibilité interculturelle" sont eux-mêmes porteurs d'une vision idéologique qui mérite d'être déconstruite. Ils peuvent imposer des cadres de pensée rigides qui favorisent certaines perspectives tout en en marginalisant d'autres.
L'idée de l'idéologie n'est pas nécessairement négative. Bien que les idéologies puissent renforcer les inégalités, elles peuvent aussi donner du sens à nos actions et promouvoir des valeurs positives comme la justice sociale ou la protection des identités culturelles. L'auteur souligne cependant que l'enjeu n'est pas d'éliminer les idéologies, mais de prendre conscience de leur présence et de les interroger de manière critique. Cela permettrait une compréhension plus nuancée des réalités sociales, économiques et politiques.
La manière dont l'idéologie fonctionne dans le contexte de l'interculturalité explique que tout effort visant à "dé-idéologiser" l'interculturalité reviendrait à tenter d'extraire l'humain de l'humanité. L'interculturalité, en tant que concept, est inévitablement idéologique puisqu'elle repose sur des positions par rapport à soi et à l'autre, au temps et à l'espace. Ce qui compte, c'est la reconnaissance des différentes idéologies en jeu et la capacité à coexister de manière constructive.
En guise de réflexion, l'article pose plusieurs questions essentielles pour inviter à une introspection sur nos propres biais idéologiques dans le domaine de l'interculturalité. Quelles sont les idéologies conflictuelles actuelles dans ce domaine ? Comment ces idéologies influencent-elles nos comportements et attitudes dans la communication interculturelle ? Est-il possible d'approcher l'autre sans le filtre des idéologies ? Quelles traces idéologiques pouvons-nous identifier dans les termes que nous utilisons pour parler de l'interculturalité ? Ces questions soulignent la nécessité d'une analyse critique continue de nos propres croyances et de la manière dont elles sont façonnées par les idéologies dominantes.