COSMOPOLITISME
Le terme cosmopolitisme remonte au début du XIXe siècle, défini comme étant "libéré des préjugés locaux, provinciaux ou nationaux", décrivant ainsi un "citoyen du monde". Cependant, cette conception du cosmopolitisme est souvent perçue comme idéaliste, irréaliste, voire élitiste. Les interviews menées avec des étudiants internationaux, généralement privilégiés, montrent que certains se qualifient de cosmopolites après des séjours à l'étranger, illustrant un imaginaire plus qu'une réalité tangible.
Cosmopolitisme et Idéologie
Le cosmopolitisme, en tant qu'idéologie, considère chaque individu comme faisant partie d'une communauté unique, l'humanité. Ce concept est enraciné dans les Lumières européennes et est souvent associé à des philosophes comme Immanuel Kant, qui a développé l'idée du "droit à l'hospitalité" pour promouvoir une compréhension universelle par l'accueil de l'autre. Des penseurs contemporains comme Beck (2014) ont poursuivi cette exploration, bien que des critiques aient émergé, appelant à une pluralité de cosmopolitismes issus de diverses traditions mondiales pour contrer la perspective eurocentriste dominante.
Mythes et Réalités
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Cosmopolitisme Européen : Un mythe courant est que le cosmopolitisme est une idée purement européenne. Or, des voix critiques soulignent la nécessité de reconnaître des variantes du cosmopolitisme ancrées dans des traditions non européennes, élargissant ainsi la portée de cette idéologie au-delà de ses origines occidentales.
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Compétence Cosmopolite : L'idée qu'il existerait une "compétence cosmopolite" est également un mythe. Le concept de cosmopolitisme est souvent associé à des formes privilégiées de mobilité et de migration, ce qui limite sa portée et son application à des groupes plus diversifiés. Par exemple, Wang (2018) a analysé le cosmopolitisme dans le contexte des migrants chinois en Nouvelle-Zélande, élargissant l'application du concept au-delà des groupes traditionnels de la classe moyenne blanche.
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Libération des Stéréotypes Nationaux : L'idée selon laquelle on pourrait devenir cosmopolite et se libérer des stéréotypes nationaux est également remise en question. Les études montrent que le cosmopolitisme est souvent lié à des formes de mobilité élitistes et que les questions linguistiques et culturelles restent centrales, mais sont souvent négligées dans les discussions.
Cosmopolitisme dans la Communication Interculturelle
Des chercheurs en éducation à la communication interculturelle, comme Holliday (2010), ont utilisé le terme pour explorer les implications du cosmopolitisme dans l'interculturalité. Noble (2013) a discuté des vertus civiques routinières de la vie interculturelle dans le cadre scolaire, en les reliant au cosmopolitisme et à la convivialité. D'autres, comme Sobre-Denton et Bardhan (2014), ont examiné le cosmopolitisme à travers une perspective postcoloniale, mettant en avant l'importance de reconnaître les différences culturelles sans les aplanir.
Études de Cas et Recherches
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Migrants Cosmopolites : De nombreuses publications ont utilisé le cosmopolitisme pour examiner certains cas de migrants. Par exemple, Marotta (2017) a étudié les théories du "stranger" en relation avec le cosmopolitisme et l'interculturalité. Lulle (2020) a exploré les rencontres cosmopolites parmi les Lettons hautement qualifiés au Royaume-Uni, tout en abordant les questions ethniques.
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Étudiants Internationaux : Les recherches récentes se concentrent souvent sur des populations privilégiées dans des contextes éducatifs informels. Kudo (2023) a étudié l'agence cosmopolite des étudiants en enseignement supérieur, tandis que Wu et Tao (2022) ont analysé la mobilité des étudiants internationaux dans les universités chinoises sous les étiquettes de "cosmopolites pragmatiques" et "dévoués".
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Apprentissage Cosmopolite : Tange (2022) a discuté de l'apprentissage cosmopolite dans le cadre du 23e Jamboree Scout Mondial, illustrant l'application du cosmopolitisme dans des contextes éducatifs mondiaux.
Critiques du Cosmopolitisme
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Confusion avec l'Interculturalité : Il n'est pas toujours clair ce qui distingue le cosmopolitisme de l'interculturalité, les deux concepts semblant souvent se recouper sans apport distinct évident de l'un à l'autre.
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Élitisme : Le cosmopolitisme est souvent associé à des formes élitistes de mobilité, excluant ainsi des perspectives plus diverses et globales. Wang (2018) fait exception en appliquant ce concept aux migrants chinois.
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Langue et Cosmopolitisme : Les questions de multilinguisme et d'utilisation de la langue dans le développement de l'agence cosmopolite sont rarement abordées, malgré leur importance centrale.
Questions Ouvertes
Des questions subsistent quant aux alternatives glocales au cosmopolitisme, issues notamment du Sud global, et à leur potentiel pour enrichir et remettre en question les présupposés du cosmopolitisme occidental. De plus, le rôle de la langue dans les discussions sur le cosmopolitisme mérite une exploration plus approfondie, étant donné son impact sur l'agence et la capacité cosmopolites.
Conclusion
Le cosmopolitisme, bien que riche en potentiel pour favoriser une compréhension interculturelle, reste un concept complexe et contesté, souvent lié à des perspectives élitistes et eurocentrées. Pour qu'il soit véritablement inclusif et global, il est nécessaire d'intégrer des perspectives diversifiées, notamment celles issues du Sud global, et de réévaluer le rôle central de la langue dans son développement.